Qu’est-ce qu’une disjonction acromio-claviculaire ?
La disjonction acromio-claviculaire est une lésion traumatique de l’articulation située entre l’acromion, qui fait partie de l’omoplate, et l’extrémité distale de la clavicule. Cette articulation, située au sommet de l’épaule, peut être endommagée à la suite d’un traumatisme direct, comme une chute sur l’épaule ou un impact violent, notamment lors de la pratique de sports de contact tels que le rugby ou le cyclisme.
Ce traumatisme provoque une rupture partielle ou complète des ligaments acromio-claviculaire et coraco-claviculaire, entraînant un abaissement de l’épaule et une ascension apparente de la clavicule, souvent visible sous la peau.
Classification selon Rockwood
La classification de Rockwood permet de graduer la gravité des disjonctions acromio-claviculaires en six stades. Le type I correspond à une entorse sans rupture ligamentaire. Le type II correspond à une rupture du ligament acromio-claviculaire seule, sans atteinte des ligaments coraco-claviculaires. Le type III associe une rupture des deux complexes ligamentaires, avec une élévation nette de la clavicule. Les types IV, V et VI sont des formes plus graves, caractérisées par un déplacement majeur de la clavicule ou une incarcération musculaire.
D’un point de vue thérapeutique, les types I et II sont considérés comme bénins, tandis que les types IV à VI sont sévères et nécessitent une prise en charge chirurgicale. Le type III occupe une position intermédiaire et fait l’objet de discussions selon le profil du patient.
Symptômes et diagnostic
Les symptômes d’une disjonction acromio-claviculaire sont généralement très évocateurs. Le patient ressent une douleur aiguë et localisée au sommet de l’épaule, immédiatement après le traumatisme. Un gonflement est souvent présent, associé à une déformation visible : l’extrémité de la clavicule paraît saillante, créant l’aspect typique de « touche de piano ». La mobilisation de l’épaule devient difficile et douloureuse, et certains patients décrivent une sensation de ressaut ou d’instabilité.
Le diagnostic repose sur un examen clinique comparatif, complété par des radiographies standard qui permettent de confirmer la disjonction et d’évaluer sa sévérité.
Le traitement orthopédique : dans quels cas ?
Le traitement conservateur, sans chirurgie, est indiqué pour les formes bénignes, c’est-à-dire les disjonctions de type I et II. Il peut également être proposé à certains patients présentant un type III, notamment lorsqu’ils ne pratiquent pas d’activité physique intense ou ne sollicitent pas fortement leur épaule au quotidien. Il est aussi indiqué en cas de contre-indication à une intervention chirurgicale.
Ce traitement repose sur une immobilisation temporaire de l’épaule par une écharpe, pendant deux à quatre semaines, associée à la prise d’antalgiques et à l’application de glace pour soulager la douleur. Une rééducation douce et progressive est ensuite mise en place afin de restaurer la mobilité de l’épaule.
Les résultats sont généralement très satisfaisants dans les formes légères (types I et II). En revanche, les résultats peuvent être plus variables dans les disjonctions de type III : certains patients conservent une gêne fonctionnelle, une douleur à l’effort ou une sensation d’instabilité. Par ailleurs, une déformation esthétique persistante, avec une clavicule proéminente, est fréquente mais rarement gênante sur le plan fonctionnel.
Indications chirurgicales
Une intervention chirurgicale est habituellement indiquée pour les disjonctions sévères, correspondant aux types IV, V et VI. Elle peut également être proposée pour les types III symptomatiques, en particulier chez les patients jeunes, sportifs ou exerçant une activité professionnelle sollicitant l’épaule.
L’objectif de la chirurgie est de réduire la luxation de la clavicule, de stabiliser l’articulation et de restaurer la biomécanique de l’épaule. Selon les recommandations de la Société Française d’Arthroscopie, l’intervention doit idéalement être réalisée dans les dix à quinze jours suivant le traumatisme. Ce délai permet de tirer parti de la phase initiale de cicatrisation et optimise les résultats fonctionnels.
La technique chirurgicale par endobouton percutanée
La technique mini-invasive par endobouton percutanée est aujourd’hui privilégiée dans notre pratique. Elle consiste à guider la cicatrisation des ligaments coraco-claviculaires à l’aide d’un système de suture synthétique, ancré entre la coracoïde et la clavicule.
Sous contrôle radiologique, la disjonction est réduite, puis un forage transosseux est réalisé à travers la clavicule et la coracoïde. Un fil très résistant, relié à des petits boutons métalliques placés en surface, est mis en place pour créer une liaison dynamique et stable entre les deux structures osseuses.
Cette méthode présente de nombreux avantages : elle est peu invasive, avec une incision limitée et une cicatrice discrète. Le risque infectieux est réduit, les douleurs post-opératoires sont limitées. Elle permet une récupération fonctionnelle rapide, sans nécessiter de retrait du matériel.
Rééducation après chirurgie
Une immobilisation post-opératoire de trois semaines protège le début de la cicatrisation ligamentaire, mais la rééducation de l’épaule est possible dès le premier jour suivant l’intervention. Le renforcement musculaire débute vers la sixième semaine. La reprise des activités ne sollicitant pas l’épaule, comme la course à pied, est autorisée après quarante-cinq jours. La reprise des sports de contact ou sollicitant l’épaule peut être envisagée à partir du troisième mois, avec des résultats fonctionnels optimaux observés entre quatre et six mois après l’intervention.
Complications éventuelles
Bien que rares, certaines complications peuvent survenir. Il peut s’agir d’un échec de maintien de la réduction en cas de rupture du dispositif, d’une irritation cutanée au niveau du bouton supérieur, ou de douleurs résiduelles localisées à l’articulation acromio-claviculaire. À long terme, des calcifications ou une arthrose secondaire peuvent également apparaître.
En résumé
La disjonction acromio-claviculaire est une blessure fréquente chez les sportifs, particulièrement dans les disciplines de contact. Les formes légères se traitent efficacement par un traitement conservateur. En revanche, les formes plus sévères justifient une prise en charge chirurgicale. La technique percutanée par endobouton offre une solution moderne, stable, fiable et peu invasive, avec d’excellents résultats fonctionnels, notamment chez les patients jeunes, actifs et exigeants sur le plan fonctionnel.